Date
16 décembre 2024
Par
Henri de la Motte Rouge
8 précautions pour mettre en place une publicité comparative licite
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Vous souhaitez booster vos ventes en prouvant que votre produit ou service surpasse celui de vos concurrents ? La publicité comparative peut être votre meilleur allié pour marquer les esprits et attirer de nouveaux clients… à condition de respecter les règles du jeu ! L'article L122-1 du Code de la consommation vous autorise à comparer vos offres, mais attention : quelques erreurs peuvent vite transformer cette stratégie en un véritable casse-tête juridique. Pour éviter les mauvaises surprises et maximiser l’impact de votre campagne, découvrez les 8 précautions indispensables à prendre pour que votre publicité comparative reste parfaitement licite.
1. Vérifiez que votre publicité comparative ne trompe pas le consommateur
Votre publicité doit être honnête et ne pas induire le consommateur en erreur. Dans le cas contraire, vous risquez de tomber sous le coup de la loi.
Prenons l'exemple de la célèbre publicité Renault : le slogan “Qui mieux que Renault peut entretenir votre voiture ?” a été jugé trompeur et donc illicite. Pourquoi ? Parce qu’il sous-entendait que Renault était le seul à pouvoir offrir un entretien de qualité aux automobiles, ce qui n’est pas prouvé. En revanche, l’affirmation “Qui mieux que Renault peut entretenir votre Renault ?” a été considérée comme licite par les tribunaux. Elle se base, en effet, sur un fait concret et incontestable : Renault est bien l’expert de ses propres véhicules (CA Versailles, 16 octobre 2008 ; Com., 10 mai 2011).
Même une simple indication de prix peut vous mettre en danger. Un opticien qui affirme que ses prix sont “moins chers qu’ailleurs” a été condamné après qu’une enquête a révélé que ses concurrents vendaient les mêmes marques à un prix inférieur (CA Riom, 26 octobre 1988).
De la même façon, si vous comparez vos tarifs à ceux de vos concurrents, attention aux détails ! Une société de location de voitures l’a appris à ses dépens. Elle a comparé ses prix avec ceux de ses concurrents, sans préciser les conditions spécifiques applicables à chaque tarif. Résultat : les juges ont estimé que cette omission pouvait induire le consommateur en erreur, car il ne pouvait pas effectuer une comparaison objective des offres (Cass. com. 1er juillet 2008, n° 07-15.839).
N'oubliez pas que la transparence est votre meilleure alliée : donnez toutes les informations nécessaires pour que le consommateur puisse comparer en toute connaissance de cause !
En résumé, avant de lancer votre publicité, posez-vous cette question : "Mon message est-il précis, clair et honnête ?". C’est en effet un élément clé pour limiter les risques de litige et renforcer la confiance de vos clients.
2. Comparez uniquement des produits ou services similaires pour mettre en place une publicité comparative licite
Assurez-vous de comparer des produits ou services qui répondent aux mêmes besoins et ont le même objectif. Une comparaison entre des produits non interchangeables est illégale !
Selon un arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) du 19 septembre 2006, les produits ou services comparés doivent présenter un “degré suffisant d'interchangeabilité pour le consommateur” (aff. C-356/04, Lidl Belgium GmbH & Co KG c/ Établissement en Franz Colruyt NV). Concrètement, vous pouvez comparer deux marques de smart TV 4K comme Samsung et LG, ou encore des services de streaming tels que Netflix et Amazon Prime Video. Ces produits ou services répondent bien aux mêmes attentes des consommateurs. En revanche, il serait abusif de comparer un aspirateur avec un robot de nettoyage. S'ils servent tous les deux à nettoyer, leurs usages et leurs caractéristiques ne sont pas directement comparables.
En conclusion, avant de créer votre campagne, prenez le temps d'identifier précisément les produits (ou les services) que vous souhaitez comparer. Assurez-vous qu'ils sont suffisamment similaires pour que la comparaison soit à la fois pertinente et licite !
3. Assurez-vous que les caractéristiques comparées sont objectives et vérifiables
Mettre en place une publicité comparative suppose de comparer des caractéristiques essentielles, pertinentes, et quantifiables, sans laisser place à la subjectivité.
Par exemple, si vous comparez des prix, assurez-vous que les produits concernés sont identiques et vendus dans les mêmes conditions. Une publicité qui omet de mentionner que l’une des agences de location de véhicules concurrentes est fermée certains jours, et donc propose des prix différents, manque d’objectivité et peut être sanctionnée (Cass., ch. Com., 1er juillet 2008).
De même, toute mention de préférence personnelle, comme un jugement sur l’esthétique, le goût, la saveur ou l’odeur des produits, est à proscrire (CA Paris, 5 février 2015, n°11/09260). Vous ne pouvez pas, par exemple, déclarer que votre parfum "sent meilleur" qu’un autre ou que votre café a "meilleur goût" que celui du concurrent. Ces remarques relèvent de l’appréciation personnelle et ne sont pas vérifiables objectivement.
En revanche, vous pouvez vous concentrer sur des caractéristiques mesurables et pertinentes. Le distributeur Casino, par exemple, a réussi à mettre en place une publicité comparative licite en comparant la composition de sa pâte à tartiner à celle du célèbre Nutella. En mettant en avant l'absence d'huile de palme dans son produit, Casino a fondé sa comparaison sur une caractéristique vérifiable et pertinente, répondant ainsi aux exigences de la loi.
Gardez toujours à l’esprit que les éléments que vous comparez doivent être factuels, mesurables, et facilement compréhensibles par le consommateur. Une comparaison fondée sur des données objectives vous évite des sanctions juridiques. Elle est également plus convaincante aux yeux des consommateurs.
4. Ne tirez pas profit de la notoriété de vos concurrents
Il est interdit de profiter indûment de la notoriété d'une marque concurrente pour promouvoir vos propres produits ou services. En clair : votre publicité ne doit pas utiliser la réputation d’une autre entreprise pour gagner en crédibilité ou attirer l’attention des consommateurs.
Prenons des exemples fictifs pour mieux appréhender ce point.
- Une marque de café peu connue qui clame : “Notre café est aussi savoureux que le Nespresso, mais à moitié prix” cherche clairement à capitaliser sur la réputation de Nespresso pour légitimer son propre produit.
- De la même façon, une marque de chaussures de sport qui affirme : “Courir avec nos chaussures, c’est comme courir avec des Nike, mais en mieux !” tente de s’approprier l’image positive de Nike pour se positionner sur le marché.
- Autre exemple : une marque de cosmétiques qui déclare que ses crèmes sont “tout aussi efficaces que celles de Chanel” utilise la renommée de Chanel pour renforcer sa propre perception de qualité.
Ces pratiques sont toutes illicites car elles s'appuient sur la reconnaissance et la réputation d’une autre marque. Ainsi, le fabricant de cartouches d'encre a été condamné pour avoir indûment tiré profit de la notoriété d'une grande marque de photocopieurs en ayant faussement déclaré que ses cartouches étaient compatibles avec cette dernière.
La mise en place d’une publicité comparative doit permettre de mettre en valeur vos propres atouts, sans chercher à vous reposer sur la notoriété d’un concurrent. Restez centré sur ce qui rend vos produits ou services uniques, et gardez une approche neutre et factuelle pour éviter les sanctions juridiques.
5. Évitez de dénigrer vos concurrents
Votre publicité ne doit jamais chercher à discréditer ou dénigrer les marques, produits ou services de vos concurrents. La loi est très claire sur ce point : toute communication qui jette le discrédit sur un concurrent peut être jugée illicite.
Par exemple, imaginez une publicité qui affirme : “Nos burgers sont préparés dans des cuisines modernes, contrairement à celles d’un fast-food douteux en ville.” Ici, vous sous-entendez, sans preuve, que les installations de votre concurrent sont de mauvaise qualité, ce qui constitue un dénigrement pur et simple.
Un autre cas de dénigrement : une publicité affichant “À peine plus loin, mais tellement moins cher” à proximité du magasin d’un concurrent a été jugée illicite. Pourquoi ? Parce qu’elle suggérait que les prix du concurrent étaient trop élevés, sans pour autant fournir de justification objective (Trib. com., Chalon-sur-Saône, 12 octobre 1995).
De manière générale, le dénigrement se produit souvent lorsqu'une publicité met en avant une caractéristique négative d'un produit concurrent dans le but de lui nuire. Et cela peut aller encore plus loin :
- Dénoncer publiquement les actions d'un concurrent en le qualifiant de contrefacteur sans qu'une décision de justice n'ait été rendue sur ce point est également considéré comme un dénigrement (CA Paris, 23 septembre 2009, n° 07/20590).
- L'utilisation de termes injurieux dans un article ou une communication à l'égard d'un concurrent peut également être sanctionnée.
Pour éviter tout risque, préférez toujours un message qui met en valeur vos propres forces. Restez positif, respectueux et objectif. Non seulement cela vous permettra de respecter la loi, mais cette approche éthique renforcera également votre crédibilité et votre pouvoir de conviction auprès des consommateurs.
6. Ne présentez pas des produits et services comme des imitations ou des reproductions
C’est une autre précaution essentielle à prendre afin de mettre en place une publicité comparative licite.
Par exemple, promouvoir un modèle de vêtement en le décrivant comme une "imitation" d'un vêtement de luxe bien connu est illégal.
De la même façon, un site Internet qui dirige les internautes vers des produits imitant les fragrances d'un parfum de marque renommée propose une publicité comparative illicite.
Il existe toutefois des exceptions. La Cour de cassation a ainsi jugé qu'informer les médecins de l'arrivée d'un médicament générique sur le marché n'est pas illicite. En effet, le générique ne revendique pas l'imitation du médicament d'origine. Il est plutôt considéré comme un équivalent ou un substituable au médicament de base.
7. Évitez toute confusion dans l’esprit des consommateurs
Certaines pratiques peuvent facilement prêter à confusion. C'est le cas si vous utilisez des expressions vagues ou des slogans laissant croire que vos produits sont liés à ceux de vos concurrents.
Par exemple, une publicité qui affirme “La même qualité que [nom de marque concurrente]” peut donner l'impression que votre produit est équivalent ou affilié à celui de votre concurrent. Une telle affirmation est trompeuse.
De même, reprendre des éléments visuels de l'image de marque d'un concurrent, tels que ses couleurs, son style graphique ou même son packaging, peut induire les consommateurs en erreur sur l'origine de vos produits. Imaginez des emballages qui ressemblent de manière frappante à ceux d'une marque bien établie. Cela peut amener le public à penser que vos produits proviennent de la même entreprise.
Il en va de même si vous mentionnez le nom d'une marque concurrente sans contexte clair. Vous pourriez laisser entendre une association entre les deux entreprises qui n'existe pas.
Enfin, adopter une stratégie de communication trop similaire à celle de votre concurrent (en utilisant le même ton, la même musique ou des slogans proches) peut faire croire aux consommateurs que votre marque est une extension ou une nouvelle version de celle de votre concurrent. En clair, votre message doit éviter toute ambiguïté !
8. Faites appel à un avocat pour mettre en place une publicité comparative licite
Lancer une campagne de publicité comparative est un exercice délicat qui comporte des risques juridiques à ne pas négliger. Pour éviter des surprises désagréables et des dépenses inutiles, il est essentiel de consulter un avocat spécialisé.
Le cabinet TLMR Avocats est là pour vous accompagner dans l'élaboration de votre stratégie de communication. Après avoir vérifié la validité juridique de vos opérations promotionnelles, nous vous proposons des recommandations sur mesure afin de minimiser les risques et d’optimiser l’impact de votre campagne.