Date
3 février 2020
Par
Henri de la Motte Rouge
Top 5 Des Pratiques Commerciales Trompeuses Sur Le Web
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En tant qu’entrepreneurs du web, vous appliquez sans doute certaines méthodes pour développer votre site Internet. Mais prenez garde, il importe de rester prudent et de bien différencier les pratiques inhérentes au marketing web, des pratiques commerciales trompeuses susceptibles d’engager votre responsabilité sur le plan civil et pénal. Les pratiques commerciales illégales sont, en effet, de plus en plus encadrées légalement, notamment par le Code de la consommation. Objectif : protéger le consommateur face aux éventuels abus commis par les commerçants.
Le risque est réel et survient le plus souvent d’une plainte d’un consommateur ou d’un concurrent ce qui déclenche un contrôle DGCCRF, pouvant déboucher sur une amende ou un renvoi devant un Tribunal correctionnel.
Pour vous aider, on a recensé pour vous le top 5 des pratiques commerciales trompeuses les plus courantes que nous voyons régulièrement sur le web et les risques que vous encourez à les mettre en oeuvre. Vous serez surpris de constater que certaines pratiques recommandées par des marketeurs sont très problématiques, mais également qu’il existe de bonnes astuces pour réduire vos risques juridiques.
C’est quoi une pratique commerciale trompeuse sur le web ?
Les pratiques commerciales trompeuses sont régies par les articles L. 121-1 à L. 121-7 et L. 132-1 à L. 132-12 du Code de la consommation qui en donne la définition suivante :
Il s’agit de toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale de la part d’un professionnel en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit, qui contient des informations sur les produits ou services qu’il met en vente, sur les engagements qu’il prend à l’égard de la clientèle ou sur les aptitudes et qualités qu’il possède, qui amène ou est susceptible d’amener le contractant à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.
Le Code de la consommation retient, par ailleurs, une liste limitative de pratiques commerciales condamnables.
Exemples : affirmer qu’un code de conduite a reçu l’approbation d’un organisme public ou privé alors que ce n’est pas le cas ou encore déclarer ou de donner l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas.
Enfin, l’article 121-3 du Code de la consommation condamne, également, les pratiques trompeuses par omission.
Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.
Il peut s’agir, par exemple, d’omettre de présenter certaines caractéristiques du produit ou du service vendu ou bien de cacher l’identité réelle du vendeur.
Il est important de noter que ces textes s’appliquent quelle que soit la nature du support de ces pratiques. En tant que web entrepreneur, vous y êtes donc entièrement soumis.
1. Bonus et vente avec prime : une pratique très encadrée !
E-book gratuit, bonus à rallonge, extrait de formation ou encore possibilité de participer gratuitement à un webinaire, la vente avec primes est une des 5 pratiques commerciales les plus courantes sur le web. Pour inciter à l’achat, vous êtes tenté par la mise en place de bonus afin d’augmenter le volume de vos ventes ? Prudence, en principe, la vente à prime est interdit par l’article L.121-19 du Code de la Consommation.
Est interdite toute vente ou offre de vente de produits ou de biens ou toute prestation ou offre de prestation de services faite aux consommateurs et donnant droit, à titre gratuit, immédiatement ou à terme, à une prime consistant en produits, biens ou services dès lors que la pratique en cause revêt un caractère déloyal au sens de l’article L. 121-1.
Sous certaines conditions, il est cependant possible d’offrir un cadeau lors d’un achat effectué par un internaute. Dans ce cas, vous devez proposer un cadeau totalement gratuit qui n’entraîne aucun coût supplémentaire pour votre acheteur. Par ailleurs, il est parfaitement illégal d’augmenter artificiellement le prix de vente de votre produit ou de votre service parce que vous offrez un bonus gratuit. Enfin, une offre de vente avec prime est une opération publicitaire. Elle ne doit donc pas être mensongère.
Ce que vous pouvez faire :
- Offrir un produit ou service identique au produit ou service acheté ;
- Proposer un objet publicitaire ou des échantillons ;
- Proposer un produit ou prestation de service gratuit indispensable à l’utilisation normale du produit vendu ;
- Proposer des prestations de services après-vente ;
- Offrir des cadeaux indépendamment de toute vente ou prestation de service ;
- Proposer un service ou un produit pour 1 euro de plus.
Règles applicables en matière d’échantillons.
Le montant des échantillons ne doit pas dépasser :
- 7 % du prix du service ou du produit si celui-ci et inférieur ou égal à 80 euros ou
- 5 euros plus 1 % du prix du produit ou du service si celui-ci coûte plus de 80 euros.
L’échantillon ne doit pas coûter plus de 60 euros et la mention « échantillon gratuit ne peut être vendu » doit être indiquée.
2. La vente au timer : des promotions à durée limitée
Créer un sentiment d’urgence chez les visiteurs de votre site Internet permet d’augmenter les conversions et de réduire considérablement les abandons de panier. Nombre de web entrepreneurs provoquent cet effet en limitant temporairement l’offre d’un produit. Ils poussent ainsi l’internaute à prendre une décision rapidement pour profiter de cette promotion exceptionnelle. Une fois encore, si vous souhaitez utiliser ce procédé de vente, vous devez faire preuve de la plus grande prudence !
En effet, cette pratique peut être considérée comme trompeuses en vertu des dispositions de l’article Art. L. 121-4 du Code de la consommation :
Sont réputées trompeuses, au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet : 1. De déclarer faussement qu’un produit ou un service ne sera disponible que pendant une période très limitée ou qu’il ne sera disponible que sous des conditions particulières pendant une période très limitée afin d’obtenir une décision immédiate et priver les consommateurs d’une possibilité ou d’un délai suffisant pour opérer un choix en connaissance de cause.
Vous ne pouvez donc pas :
- indiquer la fin d’une promotion avec un compte à rebours, alors que celle-ci est permanente ;
- annoncer des stocks réduits alors que ce n’est pas le cas ;
- présenter un nombre important de commandes déjà effectuées alors que ce n’est pas le cas ;
- afficher un compteur indiquant un nombre important de visiteurs alors que ce n’est pas le cas ;
- faire apparaître des Pop-ups indiquant des achats récents alors que ce n’est pas le cas :
- prétendre que vous allez cesser votre activité pour inciter l’internaute à vite se procurer votre produit.
Vous l’aurez compris, vous pouvez parfaitement indiquer un timer, un décompter de stocks ou encore des informations sur les achats précédents, à condition cependant que ces informations soient véridiques. Le consommateur doit, en effet, disposer d’informations fiables lui permettant de prendre une décision en toute connaissance de cause.
Il existe un vrai risque juridique à mettre en place de telles pratiques trompeuses. Mais n’oubliez pas non plus le risque pour votre réputation. Un internaute qui se rendrait régulièrement sur votre site pourrait vite s’apercevoir de la supercherie !
3. Fausses réductions et prix barrés : des pratiques commerciales trompeuses sur le web
Les fausses réductions sont malheureusement une des 5 pratiques commerciales trompeuses les plus courantes sur la toile. De trop nombreux web entrepreneurs se laissent tenter par cet agissement, dans le but de générer du trafic et d’accroître leur taux de conversion.
Pourtant, le risque juridique est réel. En effet, selon le Code la consommation, une pratique commerciale est considérée comme trompeuse, notamment lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur le caractère promotionnel du prix.
En la matière, les condamnations ne sont pas rares.
En juillet 2017, la Cour de cassation a, ainsi, condamné un site Internet vendant des produits de musculation par vente promotionnelle permanente. La société n’avait en effet jamais affiché le prix de référence de son produit. Par conséquent, la Cour a considéré que le comportement du consommateur était altéré par cette pratique. Par ailleurs, la Cour a considéré que le fait que ce dernier ait la possibilité de comparer facilement les prix pratiqués, grâce à Internet, n’était pas un argument valable pour considérer cette pratique comme légale.
En 2016, la DGCCRF annonçait, quant à elle, avoir dressé 19 procès-verbaux à l’encontre de grands sites marchands : Amazon.fr, Zalando.fr, H&M.fr ou encore Vente-privee.com et Showroomprive.com. Faux rabais, promotions permanentes mais présentées comme exceptionnelles, hausses de prix avant le début des soldes, tous ces agissements ont été sévèrement sanctionnés par la DGCCRF. Les sanctions financières infligées s’élevaient, en effet, à plus de 2,4 millions d’euros.
En vertu des articles 121-2 à 121-5 du Code de la Consommation, vous ne devez donc pas :
- majorer votre prix avant d’annoncer une promotion ;
- présenter un produit ou un service comme étant en promotion alors que cela est faux ;
- proposer une promotion permanente : vous être libre de déterminer la durée de votre campagne promotionnelle, mais celle-ci doit rester marginale.
Par ailleurs, lorsque vous lancez une promotion sur votre formation en ligne ou sur vos produits amincissants ou autres, vous devez toujours indiquer votre prix de référence ainsi que la durée de votre opération.
4. Les promesses de guérison : attention aux allégations illégales
Nombre de produits vendus sur le net se targuent d’améliorer la santé des consommateurs. Mais attention, si certaines appellations ne sont pas punies par loi, d’autres sont parfaitement illégales.
« Détoxifiant », « énergisant », « anti-cholestérol », si ces termes ne reflètent pas toujours l’efficacité réelle des produits, ils ne sont pas, en tant que tel, interdit par loi. Les industriels qui les fabriquent profitent, en réalité, d’un flou juridique autour de ces appellations et de la non-intervention du législateur, notamment européen, pour en réglementer l’usage.
D’autres mentions tombent, quant à elles, sous le coup de l’article 121-4 Alinéa 16 du Code de la consommation.
Affirmer faussement qu’un produit ou une prestation de service est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations est une pratique commerciale trompeuse.
En vertu de cet article, il est donc absolument illégal de vendre des produits prétendant guérir le cancer, le VIH ou encore la sclérose en plaques.
5. Augmentation des chances de gain aux jeux/paris : une tromperie à éviter
Parmi les 5 pratiques commerciales les plus courantes que l’on retrouve sur la toile, l’augmentation des chances de gain à un jeu en échange d’un achat conserve une bonne place. Certains grands noms du web n’hésitent pas, en effet, à utiliser cet argument pour inciter les internautes à acheter leurs produits.
Pourtant, l’article 121-4.15 du Code de la Consommation est clair sur ce point. Le fait d’affirmer d’un produit ou d’un service qu’il augmente les chances de gagner aux jeux est considéré, en tant que tel, comme une pratique commerciale trompeuse.
Si vous souhaitez organiser un concours, il vous faudra, par ailleurs, suivre la réglementation applicable aux jeux de hasard. Vous devrez, également, veiller à ce que les prix (ou leurs équivalents) soient effectivement distribués aux gagnants. Là encore, si ces derniers ne recevaient pas les prix annoncés, il s’agirait d’une pratiques commerciales trompeuses, au sens de l’article L-121.4 alinéa 18 du Code de la consommation.
Pratiques commerciales trompeuses sur le web : que risquez-vous ?
Toutes ces réglementations ne sont pas à prendre à la légère. Ces 5 pratiques commerciales, si elles sont considérées comme trompeuses, peuvent entraîner des sanctions civiles et pénales lourdes.
Pratiques commerciales trompeuses : les sanctions contre le web entrepreneurs
En tant que personnes physiques, vous pouvez être condamnés à une peine pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende. Le montant de l’amende peut être modifié en fonction des avantages tirés du délit et notamment du chiffre d’affaires réalisé par votre société : 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la pratique commerciale trompeuse. Vous pouvez également, être interdit d’exercer une activité commerciale ou de diriger une entreprise commerciale pour une durée pouvant aller jusqu’à cinq ans. Enfin, vous pourriez être condamné à verser à vos concurrents des dommages-intérêts, dans le cadre d’une action en concurrence déloyale.
Des sanctions pour votre entreprise
Votre entreprise, quant à elle, encourt une amende pouvant aller jusqu’à 1 500 000 euros. Elle pourrait par ailleurs être dissoute ou placer sous surveillance judiciaire. De plus, en cas de condamnation, le tribunal peut ordonner l’affichage ou la diffusion de l’intégralité ou d’une partie de la décision. Une bien mauvaise publicité pour vous et votre site Internet !
Vous l’aurez compris, mettre en oeuvre des pratiques commerciales trompeuses est lourd de conséquences que ce soit pour le web entrepreneur ou pour l’entreprise elle-même. Avant de mettre en place votre stratégie commerciale sur le web, si vous avez le moindre doute, n’hésitez pas à vous faire accompagner par un avocat expert en droit d’Internet. Il saura vous conseiller sur les pratiques à éviter et celles que vous pouvez mettre en oeuvre. L’objectif est de rester dans une approche marketing optimale et favorisant vos ventes tout en diminuant votre risque juridique en pratique.