
Date
11 mars 2025
Par
Henri de la Motte Rouge
Litige Informatique : Stratégies et Bonnes Pratiques
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L’informatique est fondamentale dans une entreprise puisque de nombreuses ressources dépendent de son bon fonctionnement. Faire appel à des prestataires informatiques permet aux entreprises d’intégrer des solutions adaptées à leurs besoins. Développement logiciel ou web sur mesure (software), licences de logiciels SaaS ou hébergés sur site (on premise), acquisition de matériel informatique (hardware), prestation de maintenance, ces collaborations sont essentielles… mais parfois sources de tensions.
Des litiges informatiques peuvent survenir à différentes étapes du projet. Certains conflits apparaissent dès la négociation, lorsque des engagements sont brusquement abandonnés par l’une des parties. D’autres émergent plus tard, par exemple, lorsque l’outil livré ne fonctionne pas comme prévu ou ne s’intègre pas correctement avec les systèmes existants. Enfin des litiges peuvent aussi survenir à l’issue d’une collaboration, avec des problèmes de migration et de transfert des technologies (réversibilité et interopérabilité).
Dans ces situations, les conséquences pour l’entreprise concernée sont souvent très lourdes. Outre les pertes financières, elle peut faire face à des retards de production, une paralysie de ses services, une perte de données ou encore une dégradation de son image auprès de ses clients et de ses partenaires.
Pour éviter ces complications et anticiper les risques, il est important d’adopter une approche rigoureuse dès la rédaction du contrat et tout au long de la collaboration. TLMR Avocats vous guide à travers les bonnes pratiques pour limiter les risques de conflits et les solutions disponibles en cas de différend.
Quels sont les litiges informatiques les plus fréquents ?
Du côté des clients
Certains manquements sont récurrents et constituent une source majeure de litiges dans les contrats informatiques.
Parmi les plus fréquents, on retrouve :
- Le non-respect de l’obligation de délivrer une solution conforme aux spécifications convenues.
- Le manquement aux devoirs d’information, de mise en garde et de conseil.
- Le non-respect des délais contractuels.
Les enjeux de propriété intellectuelle peuvent également être source de litiges quand ils ont été mal cadrés au départ. Cela peut concerner des questions relatives aux droits d’un développeur et aux licences. Certaines entreprises IT qui exploitent des solutions informatiques peuvent ainsi déclencher des audits sur les licences. Leur but est alors de démontrer que leur logiciel n’est pas exploité par l’entreprise conformément au contrat de licence (nombre d’utilisateurs, exploitation commerciale, etc.) .
La sécurisation des systèmes est également un point de tension fréquent. Certains clients reprochent ainsi aux prestataires un niveau de protection insuffisant. Leurs données sont alors exposées à des risques de cyberattaques et de perte d’informations critiques. Ces lacunes peuvent entraîner des complications majeures, tant sur les plans techniques et organisationnels que juridiques.
Du côté des prestataires informatiques
Les difficultés proviennent souvent du non-respect des engagements par les clients eux-mêmes. L’absence de collaboration active est un problème récurrent. Les équipes du client ne fournissent pas toujours les éléments nécessaires dans les délais impartis. Le non-respect de l’échéancier des paiements crée également des tensions financières qui peuvent compromettre la bonne exécution du contrat.
Autre source de litiges informatiques : l’absence de retour du client lors des phases de validation et de recette, ce qui retarde la mise en production et peut générer des coûts supplémentaires.
Beaucoup d’entreprises informatiques ont également des sous-traitants qui peuvent faire peser des risques sur la mission (délais, fuite de données, etc.).
Enfin, de nombreux prestataires se heurtent à une inflation des demandes. Le client multiplie les modifications et les ajouts non prévus dans le cahier des charges, tout en refusant d’ajuster le budget en conséquence. Ces comportements rendent l’exécution du projet plus complexe et entraînent de nombreux conflits.
Découvrez l'article rédigé par TLMR Avocats sur les risques juridiques des solutions SaaS.
Des litiges informatiques évitables
Toutefois, la plupart de ces litiges auraient pu être évités.
Une meilleure prise en compte et gestion des risques, une contractualisation plus précise et une communication fluide entre les parties constituent les trois leviers fondamentaux pour limiter les conflits.
En définissant clairement les engagements et responsabilités de chacun dès la phase de négociation, et en instaurant un dialogue régulier tout au long du projet, il devient possible d’anticiper et de désamorcer de nombreuses sources de litiges.
Une approche proactive repose sur des clauses précises définissant les obligations de chaque partie. Associée à des mécanismes de suivi efficaces, elle permettrait d’éviter bon nombre de ces écueils.

Comment limiter les risques d’un litige informatique ?
Une règle d’or : anticiper les principales sources de conflit entre le prestataire informatique et son client.
Faire appel à expert juridique en informatique
Solliciter un expert juridique dès les premières étapes d’un projet permet de sécuriser la relation contractuelle et permet d’anticiper d’éventuels litiges informatiques.
Son expertise garantit le respect des règles et des bonnes pratiques destinées à encadrer juridiquement le projet et à protéger les intérêts de chaque partie.
Son intervention est donc primordiale dès la phase préparatoire et notamment lors :
- De la définition des besoins du client, notamment à travers un cahier des charges détaillé et conforme aux exigences du projet. Par expérience, ce point est trop souvent négligé, alors que c’est un moment très important afin de bien déterminer les besoins et les ressources.
- Des décisions relatives à l’allocation des ressources nécessaires au projet.
- De la définition des spécifications fonctionnelles et techniques de la solution.
Rédiger une lettre d’intention
Clarifier les points clés du projet informatique dès les pourparlers est essentiel pour sécuriser la future collaboration.
La rédaction d’une lettre d’intention structure ces échanges en consignant les éléments fondamentaux de l’accord à venir et notamment :
- La confidentialité et la protection des informations échangées : une clause de confidentialité peut être intégrée afin de protéger les informations sensibles partagées lors des discussions précontractuelles et éviter leur exploitation abusive en cas d’échec des négociations.
- Les engagements réciproques des parties : définir les obligations minimales de chaque partie durant la phase de négociation (disponibilité, livrables intermédiaires, validation progressive des choix techniques, etc.) permet d’éviter les blocages et incompréhensions.
- La définition des responsabilités et de l’allocation des risques : préciser la répartition des responsabilités, notamment en cas de retard ou de modifications du projet, permet de mieux anticiper d’éventuels différends.
- Les conditions de financement et d’engagement budgétaire : encadrer les modalités financières des négociations (qui supporte les coûts en cas d’abandon ? Peut-on prévoir un remboursement partiel des frais avancés par l’une des parties ?).
- L’exclusivité des discussions : une clause d’exclusivité peut être envisagée afin d’éviter qu’une des parties ne mène des discussions parallèles avec d’autres prestataires ou clients.
- Les modalités de rupture des négociations : il s’agit ici de déterminer les conditions dans lesquelles l’une des parties peut se retirer des négociations, ainsi que les conséquences financières et juridiques d’une telle décision.
- Le régime juridique de la lettre d’intention : préciser si la lettre d’intention est contraignante ou simplement indicative, afin d’éviter toute ambiguïté sur sa portée légale et les engagements qu’elle implique.
- Les règles applicables en cas de différend : définir les modes de résolution des conflits en cas de désaccord sur l’interprétation de la lettre d’intention (médiation, arbitrage, juridiction compétente).
Ces différents éléments font de la lettre d’intention un véritable outil de structuration et de sécurisation des discussions précontractuelles dans le cadre d’un projet IT. Grâce à elle, les parties limitent les risques de litiges informatiques et facilitent la conclusion d’un accord équilibré.
Rédiger un contrat informatique équilibré et exhaustif
Attention aux contrats d’adhésion
L’externalisation des solutions informatiques et la généralisation du modèle SaaS ont conduit à une standardisation des contrats IT. Dans la plupart des cas, ils prennent la forme de conditions générales de service imposées par le prestataire, qui se trouve en position de force dans la relation commerciale.
Ces contrats d’adhésion offrent peu de marge de négociation pour le client et s’avèrent souvent déséquilibrés. Leur manque de clarté ou d’exhaustivité peut entraîner des zones de flou juridique, ce qui favorise l’émergence de litiges.
Il est donc conseillé d’entamer des négociations pour obtenir des conditions adaptées à vos besoins. Si vous n’êtes pas en capacité de négocier, nous vous recommandons fortement d’analyser en détail les conditions afin de mesurer votre niveau d’engagement. Portez une attention particulière aux garanties, aux échéances ainsi qu’aux exclusions et aux plafonds de responsabilité du prestataire.

Le contenu du contrat informatique
Les contrats informatiques sont à la fois techniques et juridiquement complexes. Une mauvaise anticipation des risques peut entraîner des litiges coûteux et des interruptions de service préjudiciables à l’activité du client.
C’est pourquoi l’intervention d’un avocat IT est fortement recommandée pour négocier un cadre contractuel équilibré et sécurisé. Son expertise permet notamment à :
- Clarifier les engagements du prestataire en matière de conformité, de performance et de continuité des services : le SLA (Service Level Agreement ou Accord de Niveau de Service en Français) doit contenir des pénalités si les niveaux de service attendus ne sont pas respectés (clause pénale ou clause libératoire).
- Anticiper les risques liés à la propriété intellectuelle, en précisant les droits d’utilisation, de modification et de transfert des logiciels ou des données. Attention, en droit français, la cession des droits même sur les développements spécifiques n’est pas automatique ! Un acte de cession conforme à l’article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle est indispensable.
- Encadrer les obligations du client (collaboration, validation des livrables, paiement).
- Définir les garanties et les responsabilités : en droit français, seuls les dommages directs sont pris en compte. Pourtant, cette notion est parfois floue, et certains prestataires jouent sur cette ambiguïté pour limiter leur responsabilité de manière excessive. Il est donc essentiel de vérifier ces clauses et, si possible, de négocier une définition plus équilibrée des dommages indemnisables. Il convient également de revoir les plafonds de responsabilité qui peuvent parfois être dérisoires.
- Prévoir des mécanismes de sortie (résiliation, réversibilité, récupération des données) pour éviter tout blocage en cas de rupture de contrat.
- Assurer la protection des données : elle doit être rigoureuse et inclure des garanties claires en matière de sécurité. Il est également indispensable d’y intégrer un accord spécifique sur la protection des données, précisant les obligations du prestataire ainsi que les instructions du client en tant que responsable de traitement. Ce document doit détailler les mesures mises en place pour garantir la conformité, y compris lorsque le prestataire fait appel à des sous-traitants. Une telle transparence permet d’assurer un contrôle effectif des données tout au long de la chaîne de traitement.
- Adapter le contrat aux évolutions technologiques, en intégrant des clauses d’adaptation aux mises à jour et aux évolutions réglementaires (RGPD, cybersécurité, etc.).
- Gérer les questions relatives à la fin du contrat (possibilité de rupture anticipée, clause de réversibilité et de transfert, collaboration du prestataire,etc.).
Assurer un suivi rigoureux du projet informatique
Un suivi attentif et une traçabilité rigoureuse des échanges sont essentiels pour éviter les incompréhensions et réduire les risques de litige informatique. En documentant chaque interaction et en mettant en place des instances de suivi adaptées, les parties peuvent anticiper et résoudre efficacement les éventuels différends.
Documenter tous les échanges
Vous devez conserver une trace écrite des emails, des réunions et des décisions importantes. Une bonne documentation permet de prouver les engagements de chacun et de clarifier les responsabilités en cas de manquement.
Un prestataire ne respectant pas ses obligations pourra difficilement les contester si toutes les étapes du projet sont consignées de manière formelle.
Réagir rapidement aux incidents
Toute réclamation doit faire l’objet d’une réponse immédiate et argumentée. Une absence de réaction peut être perçue comme une acceptation tacite d’un dysfonctionnement, ce qui fragilise la position de la partie lésée en cas de contentieux. Il est donc indispensable de traiter chaque incident avec diligence et, là encore, de conserver une trace écrite des échanges.
Encadrer le suivi contractuel avec un processus d’escalade
La plupart des projets informatiques s’appuient sur un système de ticketing. Cet outil permet :
- D’enregistrer, suivre et gérer les incidents, les demandes et les évolutions techniques.
- De centraliser les interactions entre le client et le prestataire.
- De faciliter la résolution des problèmes en offrant un historique détaillé des échanges.
Le ticketing présente toutefois certaines limites. Il est souvent conçu pour traiter des demandes opérationnelles. Il ne remplace pas un cadre contractuel structuré ni un suivi formalisé des engagements pris par chaque partie. Par ailleurs, les informations enregistrées peuvent parfois être lacunaires, mal documentées ou sujettes à interprétation. Leur exploitation est alors délicate en cas de litige informatique.
C’est pourquoi il est fortement recommandé de formaliser ces échanges par des comptes rendus écrits de l’ensemble des décisions importantes, validés conjointement par les parties. Ces documents permettent de fixer les responsabilités, d’apporter de la clarté aux engagements réciproques et de constituer une preuve essentielle en cas de différend.
Une telle approche garantit une meilleure sécurisation juridique des projets informatiques.
Que faire en cas de litige informatique ?
Malgré toutes les précautions prises, des conflits peuvent survenir entre une entreprise et son prestataire IT. Lorsque les négociations amiables échouent, il est nécessaire d’adopter une stratégie efficace pour faire valoir ses droits.
1. Faire appel à un avocat en contentieux informatique
Le droit de l’informatique est un domaine complexe qui mêle des aspects contractuels, techniques et réglementaires. Dès qu’un litige se profile, il est recommandé de consulter un avocat spécialisé pour :
- Évaluer la situation : un avocat pourra analyser le contrat, les obligations de chaque partie et identifier les manquements éventuels.
- Tenter une résolution amiable.
- Initier une procédure pour défendre les intérêts de son client en justice. Il peut alors tenter d’obtenir l’exécution du contrat, réclamer des dommages et intérêts ou faire annuler une clause abusive.
Un accompagnement juridique dès les premiers signes de conflit permet d’éviter des erreurs stratégiques et d’adopter les meilleures démarches pour préserver ses droits.
2. Privilégier la conciliation avant toute action en justice
Lorsqu’un différend survient, la recherche d’une solution amiable doit être privilégiée avant d’envisager une procédure judiciaire.
La conciliation ou la médiation permettent souvent de résoudre les conflits plus rapidement et à moindre coût. Un dialogue structuré, basé sur une documentation claire et un historique précis des échanges, favorise un règlement efficace des désaccords.
Vous devez toutefois être vigilant à ce que ces échanges très stratégiques, ne jouent pas en votre défaveur en cas d’échec des négociations.
3. Demander une expertise informatique
Le contentieux informatique étant très technique et soulève presque systématiquement des difficultés en matière de preuve. Dans certains cas, l’avis d’un expert informatique est indispensable pour éclairer le juge sur des points précis. Une expertise peut être initiée avant ou pendant la procédure judiciaire et permet d’obtenir des éléments de preuve essentiels.
À quoi sert l’expertise informatique ?
L’intervention d’un expert en informatique permet de :
- Analyser les manquements de chaque partie (exemple : non-respect des obligations de conseil du prestataire, retards imputables au prestataire ou au client).
- Vérifier la conformité de la solution IT livrée par rapport aux besoins du client.
- Évaluer le préjudice subi (pertes financières liées au retard, absence de livraison, coûts supplémentaires).
- Quantifier les prestations du prestataire si celui-ci réclame un paiement pour des développements supplémentaires.
L’expert se limite à un rôle technique et ne se prononce pas sur les aspects juridiques, qui restent du ressort du juge.
Comment mener une expertise informatique ?
L’une des parties peut solliciter un expert indépendant pour obtenir un avis technique basé sur les documents du dossier. Si les deux parties s’accordent, elles peuvent choisir ensemble un expert et définir les questions à lui poser.
L’expertise peut également être ordonnée par un juge, à la demande d’une ou des deux parties. L’expert est alors missionné pour analyser des éléments techniques dans un délai défini.
Enfin, si l’urgence le justifie, une expertise judiciaire peut être demandée dans le cadre d’une procédure en référé.
À l’issue de l’expertise, l’expert remet un rapport préliminaire aux parties, qui peuvent formuler des observations avant que le rapport définitif ne soit transmis au juge. Ce document joue souvent un rôle clé dans la décision finale.
Vous êtes confronté à un litige informatique ? Vous souhaitez prévenir les risques ? TLMR, cabinet d’avocats expert en informatique, vous accompagne à chaque étape de votre projet et dans la gestion de vos différends. Le Pôle IP/IT dirigé par Henri de la Motte Rouge a une expertise de pointe et couvre le conseil et le contentieux, avec des solutions adaptées à votre situation :
- Audit et prévention des risques
- Gestion de la négociation et de la rupture des relations commerciales
- Expertise technique et analyse stratégique
- Responsabilité contractuelle et délictuelle
- Médiation, arbitrage et résolution amiable des litiges
- Gestion et suivi des contentieux informatiques
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